Par Dr. Anna Zhenchuk, publié le 3 juin 2016 (mis à jour en juillet 2025)
Lorsqu’il s’agit de tester des aliments enrichis, des échantillons biologiques ou tout autre analyte pertinent pour la santé publique, les chiffres que nous communiquons ont du poids. Un seul résultat de test peut être utilisé pour approuver ou rejeter un produit, influencer une politique ou décider de la réussite d’un programme. Mais derrière chaque chiffre se cache une vérité simple : aucune mesure n’est parfaite.
C’est pourquoi il est si important de comprendre l’incertitude des mesures. Au lieu de saper nos résultats, elle nous donne une image plus claire de leur fiabilité et nous aide à prendre des décisions plus éclairées.
Ces dernières années, alors que je travaillais dans le domaine de la mesure des micronutriments dans les aliments et les échantillons biologiques, on m’a souvent demandé : « Quelle est la fiabilité d’un résultat de mesure ? « Quelle est la fiabilité du résultat d’une mesure ? » ou « Quelle est la précision de la méthode utilisée pour obtenir le résultat ? »
Selon la littérature et les lignes directrices internationales, il existe différentes approches pour répondre à ces questions, dont certaines sont contradictoires. Dans cet article de blog, je souhaite partager un résumé personnel et pratique de ce qui est peut-être la manière la plus largement acceptée et la plus informative d’exprimer la fiabilité d’une mesure : l’incertitude de mesure.
L’importance de l’incertitude dans la fortification
Dans les programmes d’enrichissement des aliments, les décisions réglementaires reposent souvent sur un seul résultat d’analyse de laboratoire. Sans une compréhension claire de l’incertitude associée à ce résultat, il y a un risque de prendre des décisions incorrectes, telles que le rejet d’un lot conforme ou l’approbation d’un lot qui ne répond pas aux normes requises.
Prenons l’exemple suivant : la teneur en fer d’un échantillon de farine de blé enrichie est testée. Les spécifications réglementaires exigent une teneur minimale de 30 ppm* (1). Le résultat du test indique 25 ppm. Le lot doit-il être rejeté ?
Les méthodes analytiques sont sujettes à la variabilité et chaque résultat d’essai est associé à un niveau d’incertitude. Dans le cas présent, la méthode d’essai présente une incertitude de mesure connue de 20 %. Cela signifie que la valeur réelle peut se situer n’importe où entre 25 ppm ±20%. 20 % de 25 ppm, c’est 5 ppm, ce qui donne l’intervalle 20-30 ppm, qui correspond au niveau cible de 30 ppm, et l’échantillon peut être accepté (2, 5).
Dans l’exemple ci-dessus, la valeur de ± 20 % représente un niveau de confiance de 95 % que la teneur réelle en fer se situe entre 20 et 30 ppm (5).
Cela illustre l’importance d’indiquer l’incertitude des mesures en même temps que les résultats des essais. Sans cela, les décisions d’acceptation ou de rejet peuvent devenir arbitraires et manquer de justification scientifique.
L’incertitude des mesures est un élément essentiel de l’assurance qualité et de l’application de la réglementation. Elle permet de prendre des décisions transparentes, fondées sur des preuves et conformes aux meilleures pratiques internationales. Comme le souligne le Guide ISO/CEI 98-3:2008 (révisé et confirmé en 2023), tous les résultats de mesure doivent être rapportés avec leur incertitude associée (2).
Aucun résultat n’est parfait
Commençons par une vérité simple : aucune mesure n’est parfaite. Chaque résultat comporte un certain degré d’imperfection, quel que soit le soin apporté à la mesure.
L’incertitude de mesure est le terme utilisé pour quantifier cette imperfection. Quelles sont les causes de l’incertitude ? Plusieurs facteurs, tels que (5, 6) :
- Méthodes d’échantillonnage
- Préparation de l’échantillon
- Étalonnage de l’équipement
- Conditions environnementales
- Technique de l’opérateur
En termes plus simples, l’incertitude de mesure comprend
- La possibilité de mesurer des substances non intentionnelles ou de manquer certains des analytes cibles.
- Variation entre des mesures répétées du même échantillon.
- Différences entre un échantillon et la portion analysée.
En comprenant ces facteurs, nous pouvons mieux évaluer la fiabilité de tout résultat (4).
Comment l’incertitude de mesure est-elle calculée ?
L’incertitude des mesures est généralement évaluée au cours de la validation d’une méthode, que ce soit en laboratoire ou pour des méthodes portables sur le terrain. en laboratoire ou pour les méthodes portables sur le terrain.
Il existe des lignes directrices et des protocoles détaillés fournis par l’Association des chimistes analytiques officiels (AOAC) INTERNATIONAL ainsi que par l l’Organisation internationale de normalisation (ISO) sur la manière d’évaluer l’incertitude de mesure (2, 7). La validation consiste à tester un échantillon avec une concentration connue de l’analyte dans différentes conditions. Cela permet de déterminer deux éléments clés :
- Biais : erreur systématique ou différence entre la moyenne des valeurs mesurées et la valeur réelle.
- Précision : L’erreur aléatoire, ou la variabilité des mesures répétées, exprimée en écart-type (ET) (5).

Figure 1 : Intervalle de confiance et sa relation avec l’écart-type
Pour calculer l’incertitude :
Ajoutez le biais et 2x l’écart type relatif (±2xSD) pour créer une fourchette. Cet intervalle donne un niveau de confiance de 95 %, ce qui signifie qu’il y a 95 % de chances que la valeur réelle se situe à l’intérieur de cet intervalle (2, 5).
Exemple: Si le biais est de 1 % et l’écart-type de 5 %, l’incertitude est de 1 % + (2×5 %) = ±11 %.
Lorsque nous mesurons quelque chose, l’incertitude de mesure reflète la plage autour du résultat dans laquelle la valeur réelle est susceptible de se trouver. Cette plage correspond souvent à un certain niveau de confiance : par exemple, un niveau de confiance de 95 % s’étend généralement sur ±2 DS, ce qui signifie que nous sommes sûrs à 95 % que la valeur réelle se situe dans cette plage. (Figure 1)
De même, à ±1 écart-type, la confiance est d’environ 66 %, et à ±3 écart-type, elle est de >99 %, ce qui montre que l’incertitude est directement liée à la fois à la dispersion des mesures et à notre confiance dans le résultat.
Application de l’incertitude aux essais en conditions réelles

Imaginez que vous testiez quatre lots d’aliments enrichis. Les résultats sont comparés aux limites de tolérance, qui définissent les teneurs minimales et maximales en nutriments acceptables. Si vous présentez les résultats sous forme de valeurs individuelles, deux lots sur quatre pourraient se situer en dehors des limites de tolérance, comme le montre la figure 2.
Lorsque l’incertitude est incluse, les mêmes résultats peuvent tous se situer dans la fourchette acceptable. L’indication de l’incertitude permet de s’assurer de la validité de ces résultats et d’éviter le rejet inutile de bons lots (voir figure 3 (1) (4)).
Connaître et comprendre l’incertitude des mesures permet :
- Comparaison des résultats de différents laboratoires ou appareils.
- Prise de décision en toute confiance en matière de contrôle de la qualité et d’évaluations réglementaires.
- Amélioration de la fiabilité des résultats.

De la mesure à la signification
L’incertitude des mesures n’est pas seulement un détail technique ; elle est essentielle à une prise de décision précise, équitable et crédible. Qu’il s’agisse d’un producteur de denrées alimentaires, d’un responsable de la mise en œuvre d’un programme ou d’un organisme de réglementation, reconnaître qu’aucun résultat n’est parfait permet de s’assurer que les évaluations sont à la fois rigoureuses et réalistes.
Lorsque les méthodes sont correctement validées et que l’incertitude est clairement comprise, les résultats des tests deviennent beaucoup plus significatifs. Et lorsque quelqu’un vous demandera à quel point un résultat est fiable, votre réponse ne sera pas simplement un chiffre, mais une fourchette scientifiquement étayée. Voici quelques points clés à retenir :
- Aucun résultat n’est parfait : Chaque mesure comporte un certain degré d’incertitude.
- Chaque méthode doit être validée : Il est essentiel de comprendre les biais et la précision pour garantir l’exactitude des résultats.
- La connaissance de l’incertitude conduit à la confiance : Elle permet de prendre des décisions éclairées et justes.
De la précision en laboratoire à l’efficacité sur le terrain
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*Les parties par million (ppm) sont une unité standard utilisée pour exprimer les concentrations de substances à l’état de traces dans les matrices alimentaires (3).
Références
- OMS. Directive de l’OMS : enrichissement de la farine de maïs et de la semoule de maïs en vitamines et minéraux. Genève (Suisse) : OMS ; 2016.
- Incertitude de mesure – Partie 3 : Guide pour l’expression de l’incertitude de mesure (GUM:1995). Guide ISO/IEC 98-3:2008(en). Disponible à l’adresse suivante www.iso.org. Révision et confirmation en 2023
- Bell S. Guide de l’incertitude de mesure pour les débutants. Measurement Good Practice Guide No. 11 (Issue 2). National Physical Laboratory, Royaume-Uni, 2001.
- De Bièvre, P. et Günzler, H. Incertitude de mesure en analyse chimique. Paul Springer Science & Business Media, 29 juin 2013.
- Ellison, S.L.R et Williams, A. Guide Eurachem/CITAC : Quantifying Uncertainty in Analytical Measurement, troisième édition, (2012) ISBN 978-0-948926-30-3. Disponible à l’adresse suivante www.eurachem.org.
- Lignes directrices pour les laboratoires effectuant des analyses microbiologiques et chimiques de denrées alimentaires, de compléments alimentaires et de produits pharmaceutiques – Aide à l’interprétation de la norme ISO/CEI 17025:2005. (2015) (Lignes directrices de l’ALACC). Disponible auprès de www.aoac.org.
- White, G.H. Bases de l’estimation de l’incertitude de mesure. Clin Biochem Rev. 2008 Aug ; 29 (Suppl.1) : S53-S60.
- Directives de la FAO sur l’incertitude des mesures, 2021.
















































